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June 2013

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Les membres du syndicat dénoncent un abus du Programme des travailleurs temporaires étrangers

Au début du printemps, la plus importante banque du Canada a fait l'objet de vives critiques lorsqu'il fut révélé que cinquante (50) de ses employés en technologies de l'information avaient été mis à pied et remplacés par des travailleurs étrangers temporaires venus d'Inde. Ces nouveaux salariés sont dépêchés par une firme multinationale de sous-traitance.

« Cette situation est inacceptable. Bien qu'elle ait fait des milliards en profits, la banque a pris cette décision sans se soucier de ce qui allait nous arriver », dit un employé de la Banque Royale du Canada touché par les licenciements.

Partout au Canada, les dirigeants syndicaux ont réagi en menaçant de retirer des millions de dollars de la Banque Royale. La section locale 230 de Victoria en Colombie-Britannique qui fait affaire avec la RBC depuis plus d'un demi-siècle, fait partie de ce groupe.

« La RBC affiche des profits records et cet abus flagrant du Programme des travailleurs étrangers temporaires est une gifle à la figure de tous les travailleurs canadiens » dit le confrère Phil Venoit, gérant d'affaires de la section locale 230.

« Malheureusement, le comportement de la RBC n'est que le plus récent exemple d'employeurs qui abusent du programme des travailleurs étrangers temporaires pour augmenter leurs profits aux dépens des travailleurs canadiens », affirment les dirigeants syndicaux.

Le programme qui a été établi dans le but de permettre aux employeurs de faire entrer au pays de petits groupes des travailleurs qualifiés et en demande sur une base temporaire, n'a cessé de prendre de l'ampleur au point que le nombre de travailleurs temporaires au Canada, soit plus de 330,000, correspond presque à la population totale du Nouveau-Brunswick. Et ce nombre continue de croître.

Initialement mis en place pour recruter de la main-d'œuvre hautement qualifiée, ce programme s'est étendu de façon considérable sous le gouvernement conservateur dirigé par Stephen Harper, à presque tous les secteurs de l'économie, du secteur de la construction à celui des services.

Cette expansion a entraîné une intensification de la pression à la baisse sur les salaires et une stagnation de l'emploi pour les travailleurs canadiens, en particulier pour les moins de 35 ans.

« Toutes les chaînes de restauration rapide et les hôtels ont recours aux travailleurs étrangers. Nos jeunes qui comptaient sur ces emplois auront beaucoup plus de difficultés à trouver du travail », affirme le confrère Venoit.

Une étude menée par la Fédération du travail de l'Alberta a révélé que les employeurs avaient fait venir dans la province, des milliers de travailleurs temporaires de plus que le nombre d'emplois créés, condamnant les Canadiens au chômage ou à des emplois à temps partiel peu rémunérés.

Dans plusieurs parties de la région des sables bitumineux, il y a un travailleur temporaire pour quatre (4) à neuf (9) de chaque dix (10) nouveaux emplois créés.

Comme l'indique la Fédération du travail de l'Alberta (FTA), plus d'un nouvel emploi sur six est occupé par un travailleur étranger temporaire.

Parmi les incidents les plus remarquables, notons celui de l'entreprise HD Mining International Ltd qui a fait venir plus de 200 mineurs chinois pour travailler dans les mines de charbon de Murray River en Colombie-Britannique. La compagnie est même allée jusqu'à exiger la maîtrise du mandarin comme condition d'emploi.

Le programme permet également aux employeurs de payer 15% de moins que le salaire courant aux travailleurs étrangers, ce qui donne lieu à une pression à la baisse sur tous les salaires.

Malgré la reprise économique suite à la récession de 2008, le nombre de Canadiens gagnant 13 $ l'heure ou moins est demeuré stable, indique la fédération du travail, une statistique qu'il attribue au recours à main-d'œuvre étrangère mal rémunérée.

Le système rend aussi les travailleurs étrangers vulnérables aux abus.

« Cela revient essentiellement à une forme de servitude. Les travailleurs dépendent complètement de leur employeur pour leur permis de séjour et peuvent être renvoyés dans leur pays d'origine en tout temps. Certains d'entre eux dépendent de l'employeur même pour leur fournir logement et couvert. De plus, ils ne sont pas admissibles à une indemnisation pour les accidents de travail et ne peuvent cotiser au Régime de pension du Canada », dit le confrère Venoit.

« Ils n'ont aucun droit. Le département des métiers de la construction de la Colombie-Britannique par exemple a indiqué qu'ils avaient trouvé un groupe de Costaricains travaillant sur le réseau de transport express de Vancouver à un salaire de 3.67 $ l'heure », ajoute-t-il.

Même les partisans du gouvernement sont critiques, incluant l'économiste de droite Herb Gruel, associé de l'Institut Fraser.

« Le programme des travailleurs étrangers temporaires est en fait une subvention à l'entreprise qui permet aux grands utilisateurs d'éviter d'augmenter les salaires pour attirer la main-d'œuvre, d'investir dans la formation ou d'automatiser la production pour accroître la productivité », déclarait Gruel dans le Vancouver Sun.

Au mois d'avril, les pressions du public ont poussé le gouvernement fédéral à annoncer des réformes au programme pour répondre aux plaintes et aux critiques. Ces réformes exigeront des employeurs qu'ils s'efforcent davantage à recruter des Canadiens pour doter les postes disponibles avant de faire venir des travailleurs étrangers et qu'ils paient des frais d'utilisation pour les permis de travail accordés. Le gouvernement a également éliminé la différence de salaire de 15% entre les travailleurs étrangers et ceux du Canada.

Toutefois, les groupes de défense des droits des travailleurs sont sceptiques. « C'est une autre politique glissante du gouvernement Harper. Ils veulent donner l'impression qu'ils ont pris une mesure importante pour répondre aux préoccupations du public, alors qu'en réalité les bases du programme sont inchangées », déclarait Gil McGowan, Président de la Fédération du travail de l'Alberta, au Globe and Mail.

« Les syndiqués et tous les Canadiens soucieux d'occuper des emplois bien rémunérés doivent continuer à faire pression sur les conservateurs afin d'éliminer les abus du Programme des travailleurs étrangers temporaires. Il incombe donc au gouvernement fédéral de réformer entièrement ou d'abolir le programme qui touche durement les Canadiens ainsi que les travailleurs étrangers », conclut Phil Flemming, Vice-président du Premier District.


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Victoria, British Columbia, Local 230 is threatening to withdraw millions in funds from the Royal Bank of Canada to protest its role in outsourcing Canadian jobs. Photo used under a

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